Un ultimatum émoussé http://bit.ly/fTt5IC
Hier soir, rien n’indiquait que la prise qui alimente encore, vaille que vaille, la mission de Wouter Beke (CD&V) serait débranchée cette semaine. La N-VA, d’où la menace majeure pouvait venir, a plutôt choisi d’occuper le terrain médiatique pour réclamer un débat parlementaire sur les mesures qui seront prises par le gouvernement Leterme pour trouver l’équilibre budgétaire en 2015 et répondre ainsi aux impératifs européens. Et, une nouvelle fois, la N-VA s’irrite de ne pas être associée aux travaux du gouvernement d’affaires courantes. On y reviendra. Car il faut d’abord signaler que les nationalistes flamands se sont montrés assez flous quant à leur volonté de respecter un de leurs nombreux ultimatums, à savoir l’après-vacances de Pâques. Ils verront bien ce qui est proposé, s’est contenté de dire en substance Jan Jambon, chef de groupe N-VA à la Chambre, en évoquant tant les mesures du gouvernement que les développements des négociations institutionnelles. D’aucuns s’attendaient à des déclarations bien plus fracassantes. Dans le monde politique, on faisait peu de cas de cette nouvelle communication N-VA.
"C’est pour la galerie. Une fois de plus, on constate la différence entre ce que Bart De Wever dit à la table et ce qu’il dit aux médias"
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La démonstration inattendue de la N-VA
La réponse aux récriminations de la N-VA est sans appel : le gouvernement démissionnaire a entièrement raison de s’acquitter de son devoir européen. C’est surtout à lui-même que le parti nationaliste doit la situation qu’il récuse.
L’Union européenne attend de ses États membres, donc de la Belgique, deux « devoirs » pour la fin avril : les engagements liés au Pacte de stabilité, c’est-à-dire les prévisions budgétaires des années à venir ; et un « programme national de réformes », autrement dit les mesures destinées à stimuler la croissance tout en réduisant les déficits publics.
Fin avril : c’est donc assez urgent. Les « affaires urgentes », dans les usages belges, font partie des affaires courantes qu’un gouvernement du même nom est tenu d’assumer en attente de son successeur. La réponse aux récriminations de la N-VA à l’encontre du gouvernement Leterme est donc sans appel : le Premier ministre et son attelage démissionnaire ont entièrement raison de s’acquitter de leur devoir européen. C’est peu dire : ils ne s’acquittent en fait que de leur plus élémentaire devoir.
La difficulté criante de la N-VA à être trop démonstrative dans ses protestations s’explique aisément : c’est surtout à lui-même que le parti nationaliste doit la situation qu’il récuse. Le paradoxe n’est pas banal. Plus ce parti a voulu maintenir dans la précarité le gouvernement démissionnaire, et plus il a fini par le renforcer. En forçant à peine le trait, on en viendrait même à constater que le parti nationaliste a inventé sans le vouloir la martingale pour ce pays à l’instabilité politique légendaire : un gouvernement qui n’a plus peur de rien ! Et surtout pas de tomber, puisque c’est déjà fait il y a bien longtemps.
Voilà comment l’équipe Leterme s’est découvert la liberté inattendue d’assumer tranquillement les tâches les plus ardues. Avec à sa tête un Premier ministre dont on n’a pas fini de découvrir la capacité manœuvrière, mais aussi une étrange stature personnelle qui a grandi à partir du moment où son pouvoir formel a commencé à s’effriter.
On conviendra que pareil fonctionnement où le parlement peine à exercer son contrôle, puisqu’aucun membre ne sait s’il y est majorité ou opposition, est tout sauf idéal. Mais on se refusera difficilement cette satisfaction, fût-elle passagère : à force de s’être échinée à démontrer que cet État ne fonctionne pas, c’est la N-VA elle-même qui a fini par prouver le contraire.
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