mardi 19 février 2013

Marcel: Sérial-blogueur et mélodiste en sous-sol

Cette semaine, un twauteur qui sera présent à la Foire du Livre de Bruxelles avec son dernier bouquin "Indignés de Cons — La Crise expliquée aux Cancres et aux Économistes".

Marcel et moi, c'est un peu comme "chien et chat", mais donnons-lui la parole pour une fois en plus de 140 caractères [sur twitter], mais en moins de 140 pages [comme sur son blog] !;-)
. , qui es-tu en dehors du "Moi, je suis St-jobois d'origine laekenoise avec des ancêtres fritz, kaaskop, vloms, dikkenek et macaroni" qui t’identifierait ? 

Ben, je suis tout ça. Et comme on discutait toi et moi de l'identité sur Twitter, j'ajouterais qu'à chaque heure qui passe, nos 'identités" évoluent. On est ce qu'on apprend, ce qu'on découvre. Assumer toutes les facettes de soi, et leur évolution, c'est progresser. Tenter de correspondre à "une identité", c'est s'ancrer [s'encrer ? ndlr] et donc cesser d'avancer.
Quand j'écoute Wannes Van De Velde, je suis flamand. Quand j'écoute Brel chanter Mathilde, je suis Bruxellois. Quand je lis HhhH de Laurent Binet, je suis tchèque et slovaque. Et je suis français quand je lis chez Montesquieu "Les femmes persanes sont plus belles que les femmes françaises, mais les Françaises sont plus jolies".
Alors, qui suis-je ? 
À la base, je serais plutôt un germain, si l'on en croit Bart De Wever. Mon père avait l'allemand pour langue maternelle, fils d'un résistant des Cantons rédimés. Ma mère, bilingue bruxelloise d'origine plutôt flamande et hollandaise parlait indistinctement le français et le "brusseleir" avec ses parents. J'ai été élevé en français parce que c'était la langue que mes parents avaient en commun. Mais en fait, tout le monde était ou a fini au moins quadrilingue à la maison. Mon grand-père allemand (paternel) a donc résisté au nazisme de 1940 à 1944 en tant que pacifiste catholique mais, étant allemand, il a aussi tiré sur mon arrière-grand père maternel (néerlandophone) à l'Yser. Et ils ont tous les deux subi le gaz moutarde. Alors, qui suis-je en partant de tout ça ? Je ne peux pas te répondre, parce que ça ne peut être qu'organique, évolutif, changeant. Je sais de quoi j'hérite, c'est tout. J'aurais d'ailleurs du mal à me définir selon un territoire ou une langue. Mon pays, c'est les mots, la musique.
Je suis aussi passionné de cuisine, un athée fasciné par les religions, et un égo sur pattes qui est toutefois conscient que cette invraisemblable prétention d'avoir quelque chose à dire (qui anime à peu près tous les twittos que j'observe) implique une responsabilité, une honnêteté quant aux messages que l'on diffuse. All magic comes with a price.


Ta genèse et parcours prof-médiatique ?

J'ai commencé à écrire à neuf ans, un poème sur le printemps. Je n'ai jamais arrêté depuis. Au même âge, je me suis mis à jouer de la guitare, à composer et à chanter (mal). En gros, je voulais devenir John Lennon ou Boris Vian.
Par après, j'ai toujours fait l'un ou l'autre : l'écriture et la musique. J'ai aussi toujours été attiré par la radio (j'ai "travaillé" sur Radio Plus au début des radios libres) et la réalisation. En 1987, je suis entré dans la pub. J'ai travaillé pour de grandes marques. C'était une façon de (très bien) gagner ma vie en peaufinant mon style. Ça va faire rire, mais c'est la pub qui m'a appris à faire court. [Effectivement, MDR ;-) ndlr] Si je veux…
Je suis tombé dans l'essai presque par hasard. Quand Quatremer a sorti l'interview de Leterme, j'étais concentré sur mon premier roman et un album de musique (Marcelization, sorti confidentiellement en 2008).
Quelques mois plus tard, en 2007, on m'a proposé d'écrire des scénarios pour TV Belgiek (sur RTL-TVI). C'est en me replongeant dans la politique belge et en constatant qu'on allait au blocage que j'ai mis ce premier roman (que je compte finir cette année) de côté. Jean m'a incité à lancer mon blog et à écrire sur cette Belgique que je défendais (longuement) sur son blog. J'ai écrit Walen Buiten en 2008. J'ai lancé mon blog en 2009 et publié en numérique "La Flandre, ça n'existe pas". Walen Buiten est sorti chez Jourdan en 2010. L'année suivante, j'écrivais "Les Secrets de Bart De Wever". Cette année, je sors… un quatrième essai. Il ne s'agit presque plus de politique belge… Surprise ! Mais tout ça, c'est par nécessité citoyenne. Si on m'avait dit il y a dix ans que j'allais écrire des essais politiques, je ne l'aurais pas cru !


Quelle est ton utilisation des réseau sociaux et de twitter?

"C'est énorme !", dirait Lucchini. #Twitter est à la fois ma source d'information (via les comptes des journaux, mais aussi des agrégateurs, comme @vlaanderen) ; une façon d'exister et de se maintenir entre deux livres (ne soyons pas langue de bois) ; un centre d'alerte quand je publie un billet de blog ; un lieu relationnel extraordinaire où l'on rencontre des esprits avant de rencontrer les personnes. C'est étonnant, mais tous les gens que j'ai apprécié sur Twitter, je les ai aimés quand je les ai rencontrés IRL ! C'est aussi le lieu idéal pour confronter mes idées, mes convictions, à celles des autres, particulièrement des "adversaires".


Quelles sont "tes bêtes noires actuelles" ?

- Ça ne va surprendre personne, mais au niveau belgo-belge, c'est la N-VA, mais pas que. La façon dont une partie de la presse flamande entretient, souvent sans s'en rendre compte, la notoriété de l'homme est presque plus importante. Si la N-VA était toujours à 5%, je n'en parlerais presque jamais. Du moins pas plus que des autres partis nationalistes. Ce qui me sidère, ce n'est pas tant son idéologie, que je commence à bien connaître, mais son succès. Franchement, je serai très heureux le jour où le soufflé retombera (le 25 mai 2014) ? Parce qu'alors, je pourrai m'occuper d'autre chose. J'ajoute que je ne "déteste" pas forcément les politiciens N-VA. Il y a des gens dont j'apprécie l'engagement que je perçois comme réellement sincère.

- Ce qu'on appelle "le néolibéralisme" (mot très mal choisi), qui est en fait du financiarisme, et qui mine nos sociétés et l'économie de marché.
Scoop : j'en parle dans mon nouveau livre, Indignés de Cons — La Crise expliquée aux Cancres et aux Économistes.


Et tes bêtes noires de toujours?

- Mettons que ce serait avant tout l'injustice. Tout découle de là. L'antinationalisme, l'antifascisme, l'anticommunisme, l'antiobscurantisme coulent de source ensuite. Je crois qu'on ne peut pas améliorer la justice en se choisissant des boucs émissaires comme l'étranger, le communiste, le possédant, l'athée, le chrétien, le musulman. Je ne crois pas qu'on puisse arriver à un monde juste, mais que tout manque de volonté nous amènera à un monde plus injuste.

- L'idée facile. Celle qui se répand trop sans réel contrôle du fond. Elle sert les idéologies dites "populistes". Je trouve ainsi invraisemblable qu'on entretienne dans certains milieux l'idée qu'être antinationaliste revient à être antiflamand. Ou celle qu'une région comme la Wallonie peut se redresser toute seule, sans investissement. La dernière en date voudrait que le PS serait l'allié objectif de la N-VA. Je trouve cette vision étriquée. Je ne dis pas qu'elle est fausse, mais qu'elle est dangereusement incomplète si on ne la recadre pas dans un ensemble où la N-VA est aussi à la base d'un manichéisme tragique qui permet justement de regarder les choses de cette manière. Ce qui est étonnant, c'est que ces idées sont souvent produites par un journaliste et reprises par un tas d'autres, à travers la frontière linguistique, comme une vérité. Une autre est que Bruxelles serait mieux gérée s'il n'y avait pas les communes. Le fait qu'on ait parlé de "baronnies" montre que c'est une idéologie avant d'être une idée. Il faut réformer Bruxelles, réduire les pouvoirs communaux, rendre la structure plus cohérente et ça implique qu'il faut rappeler sans cesse que mandataire public n'est pas un métier mais un engagement et que donc, ceux qui prennent la population en otage de leurs ambitions politiques ou, pire, financières, on peut franchement s'en passer. Mais j'ai du mal à comprendre pourquoi ce serait forcément le modèle anversois qui permettrait d'améliorer Bruxelles. Voilà. je me méfie des idées trop simples. C'est pour ça que j'écris (trop) long quand je tente de les décortiquer.

- Les communicateurs (journalistes, politiciens, opinionnistes, etc.) qui tombent dans ces panneaux conceptuels sans trop réfléchir parce qu'ils correspondent à leur idéologie préconçue et sert leur système d'idées et surtout qui, ensuite, "informent" incorrectement les gens qui les écoutent. C'est la raison de ma querelle avec Vincent Laborderie, par exemple. Pourtant, je suis d'accord avec lui sur pas mal de choses, mais pas sur l'attitude. Bien sûr, je suis aussi susceptible de tomber dans ce genre de panneau, on l'est tous. Mais nous avons aussi tous la capacité d'en prendre conscience et de regarder l'autre vision, si possible, systématiquement. Je ne dis pas que j'y parviens. Je dis qu'il faut essayer. Et répéter sans arrêt que nous ne sommes que des observateurs et qu'aucun de nous n'a la science infuse. Ça me paraît fondamental.


2-3 sujets plus perso, hors politique ?

Phineas, je pense qu'on va devoir d'abord passer un certain temps à chercher des sujets qui ne seraient pas politiques ! :-)
Mais par exemple La linguistique : Pendant des années, je me suis intéressé aux langues. J'ai acheté des tas de méthodes Assimil, et j'ai appris des tas de langue avec un succès inégal. Ainsi, en Japonais, je peux commander des sushis et du thé ou du saké chaud dans un restau. Ou demander où se trouve la Tour de Tokyo, ce qui n'est pas très souvent nécessaire tant qu'on n'est pas à Tokyo. En Portugais, je peux expliquer le nationalisme en faisant beaucoup de fautes. En kiswahili, j'ai tout oublié, sauf la structure. Je pourrais dire que je suis un linguiste expérimental : je n'ai pas appris la linguistique selon les formes académiques, mais en assimilant des bribes de langues. Ce qui nous mène à L'autodidacte : j'ai toujours eu du mal à suivre un cours. Ce qui me dérangeait n'était pas tant l'apprentissage, au contraire, mais le fait d'être soumis à un choix dicté par l'académicien. J'ai toujours préféré explorer les choses par moi-même. Il en va de même en politique. Je n'ai pas fait science po, mais j'ai lu énormément, selon un choix personnel mais pas univoque. Je me méfie de la "dictature scolaire". Et plus encore du maître qui, pour être respecté, pense devoir imposer son image et sa connaissance comme indéniable a priori. Ce sont de telles attitudes qui permettent à des idéologies fondamentalement dangereuses de prendre pied dans la société. Je suis parfaitement conscient que mon parcours autodidacte m'a coupé d'une partie du savoir, mais en même temps, je n'ai jamais eu besoin d'un prof pour penser par moi-même. C'est une culture familiale, j'ai grandi avec. En revanche, ça me donne un point de vue totalement indépendant, peut-être original (c'est du moins ce qu'on me dit). Et sinon, si tu veux une liste de hobbies, il y a la cuisine (exotique) l'histoire, l'art en général, la musique, le cinéma… Suis-je engagé ?


Futur perso dans 5 ans, 10 ans , ... 

J'aimerais pouvoir vivre uniquement de ma plume créative (aujourd'hui, la moitié de mes revenus proviennent de mon activité de copywriter et de conseiller en communication).
Et j'ai toujours les mêmes envies qu'à 15 ans : la radio, le roman, la réalisation, la musique.
Je me demande d'ailleurs si je n'ai pas toujours quinze ans, en fait.


Merci Marcel ! A bientôt !;-) 


Lire aussi:
“Indignés de Cons”: Marcel Sel leur pique la crise…

Ce n’est assurément pas un hasard si le petit Marcel Sel devenu grand cultive toujours, d’évidence freudiennement, une passion pour les scoubidous, référence récurrente de son dernier
ouvrage “ Indignés de Cons".
C’est que l’homme aime jouer avec les fils conducteurs, tantôt noirs et jaunes (“Les secrets de Bart De Wever”), tantôt pour démêler ceux, si tellement noués serrés, qui transforment l’économie en un bigntz de noeuds explosifs tellement top compliqués que le citoyen lambda s’en sent scoubidonné d’impuissance.

1 commentaire:

  1. Sel et Henrion: http://www.lalibre.be/societe/cyber/article/814481/qui-sont-ces-blogueurs-influents.html?utm_source=twitterfeed&utm_medium=twitter

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