dimanche 15 avril 2012

Plus de 40 000 étrangers.be

Chaque année, plus de 40 000 étrangers s’installent en toute légalité en Belgique via le regroupement familial: la loi durcit les conditions du regroupement familial en Belgique.

Discriminatoire ?
Attentatoire au droit fondamental pour tous de vivre en famille ?
Six associations actives dans la défense des droits des étrangers en sont persuadées : elles ont introduit devant la Cour constitutionnelle un recours en annulation de la loi entrée en vigueur en septembre 2011 et qui fixe des conditions nettement plus strictes pour le regroupement familial.

C’est particulièrement le cas pour les citoyens belges, désormais traités sur le même pied que les non-européens. Plus question pour eux de se faire rejoindre par leurs ascendants (les parents) : en ce qui les concerne, le regroupement familial est limité aux conjoints (ou cohabitants) et aux enfants mineurs. En revanche, les Européens non Belges vivant en Belgique ont toujours l’occasion de faire venir leurs parents. Autre modification : des revenus équivalents à 120 % du revenu d’intégration (1 184,50 euros par mois) ainsi qu’ "un logement suffisant" sont exigés pour se faire rejoindre par un conjoint - les conditions de revenus ne sont pas d’application pour les enfants mineurs. Voilà qui introduit une discrimination entre les différents citoyens européens, dénoncent les six associations représentées par Me Pierre Robert. "Un Belge a donc davantage de difficultés à vivre en famille qu’un autre citoyen européen."
Pourquoi cette bizarrerie ? En réalité, le nouveau dispositif cible, sans l’avouer, les citoyens belges d’origine marocaine et turque, deux communautés largement présentes en Belgique. Les travaux parlementaires y font clairement référence, ajoute Me Robert : "La loi semble dès lors être discriminatoire sur ce point également."
On peut encore voir dans l’introduction d’un minimum de ressources dans les conditions nécessaires au regroupement "une forme de discrimination sur base de la fortune" . Bref, de telles dispositions, couplées à une interprétation très stricte de la loi par l’Office des étrangers, "ne laissent plus aucune place à l’analyse de la situation individuelle et des réalités familiales" , déplorent les associations.
Les partis flamands et le MR, artisans de ce tour de vis, n’en faisaient guère mystère : cette loi vise à resserrer drastiquement ce canal d’immigration important qui permet chaque année à plus de 40 000 étrangers, essentiellement marocains et turcs, de s’installer en toute légalité en Belgique. A l’époque, le débat parlementaire avait été vif. Si tous affirmaient partager l’objectif de la loi (lutter contre les abus), certains députés en ont critiqué les excès. Alors secrétaire d’Etat à la politique d’Asile, Melchior Wathelet s’était abstenu (comme les autres CDH, le PS, le FDF Maingain et une SP.A; Ecolo avait voté contre), pointant notamment "une discrimination injustifiable" entre Belges et autres citoyens européens. "Certains vont s’engouffrer dans l’insécurité juridique que vous créez" , avait-il averti.
On y est donc Et ce n’est pas une surprise : dans son avis sur le texte, le Conseil d’Etat avait aussi soulevé le problème. Le recours des associations aligne près de 40 motifs pour annuler les mesures discriminatoires de la loi.



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Plus de 11 millions d'illégaux vivent aux Etats-Unis

Quelque 11,5 millions de personnes sans papiers vivent aux Etats-Unis, selon les estimations diffusées vendredi par le département de la Sécurité intérieure.
Ces estimations qui prennent en compte des données arrêtées en janvier 2011 sont stables par rapport à celle des années précédentes.
En 2010, ils étaient 11,6 millions de clandestins à vivre aux Etats-Unis, selon les chiffres du ministère qui pointe la difficulté à estimer précisément cette population entrée illégalement sur le territoire.
"Il est très peu probable que la population d'immigrés non autorisée ait augmenté depuis 2007, étant donné le chômage important aux États-Unis, les conditions économiques meilleures au Mexique, les chiffres de détention aux frontières en baisse et l'augmentation du nombre des agents dans ces régions", écrit le ministère.
Les Mexicains représentent 59% des sans-papiers présents, les Salvadoriens 6%, les Guatémaltèques 5%.

"Les campagnes de régularisation étaient clairement une erreur"

"Les campagnes de régularisation des précédentes années étaient clairement une erreur", estime samedi Jozef De Witte, le directeur du Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme, dans De Standaard.
"Si les gens savent qu'ils reçoivent des papiers lorsqu'ils tiennent le coup assez longtemps, ils essayent de gagner du temps de toutes les manières possibles. C'est ce qui a pour conséquence ultime l'apparition de grèves de la faim."

"On récolte aujourd'hui ce que l'on a semé", ajoute-t-il encore. "C'est mieux de régulariser tout de suite lorsque les raisons humanitaires le justifient, plutôt que d'attendre une campagne."

Le directeur se pose par ailleurs des questions sur le renforcement de la loi sur le regroupement familial. "Chaque personne a le droit à la vie de famille, pas seulement ceux qui sont riches."


Regroupement familial : changer de logique

En votant une réforme de la procédure de regroupement familial qui discrimine les Belges par rapport aux Européens, le Parlement belge ne s’est assurément pas grandi. Les parlementaires qui l’ont votée n’ignorent pas que leur texte sera cassé par la Cour constitutionnelle ou par la Cour européenne des droits de l’Homme de Strasbourg. Et pourtant ils se sont obstinés, les uns pour se positionner en flèche sur un terrain – l’immigration – jugé électoralement payant, les autres pour qu’on ne puisse pas les taxer de laxisme dans un climat de surenchère.
Cette question aurait mérité un autre traitement. Avec environ 30000 entrées en 2009, le regroupement familial est, depuis l’arrêt de l’immigration du travail en 1974, de loin le premier canal d’arrivée de nouveaux migrants légaux en Belgique. Il se dit que cette migration fait l’objet de nombreux abus (les mariages de complaisance) et qu’elle sollicite trop notre système de solidarité en mettant de nombreuses personnes « regroupées » à charge des CPAS. Ce qui expliquerait la nécessité de durcir les conditions du regroupement familial.
Ces affirmations ne sont sans doute pas dénuées de tout fondement, quoi qu’on aimerait bien disposer de données statistiques sérieuses au lieu de s’en remettre à des lieux communs basés sur des perceptions superficielles qui se donnent des airs d’évidence. Mais ce qui est sûr, c’est que les réponses qui sont apportées ne sont ni les plus justes, ni les plus efficaces eu égard à l’objectif proclamé.
Veut-on décourager le regroupement « abusif » des ascendants, qu’il s’agisse des Belges, des Européens ou des autres résidents légaux ? Il faudrait peut-être d’abord se demander pourquoi des personnes d’âge mur, aspirant normalement à une vieillesse sereine dans un cadre familier, seraient intéressées par un regroupement familial avec leurs enfants résidents en Belgique. N’est-ce pas autre chose qu’elles souhaitent : pouvoir simplement et sans vaines tracasseries rendre visite à leurs enfants expatriés, notamment pour des grands événements de la vie familiale (mariages, naissances), et ce sans forcément devoir abandonner leur logement ni se couper de leurs repères. Or, la délivrance des visas reste une épreuve, à recommencer pour chaque voyage. Pour un habitant d’Oujda, la métropole marocaine située à la frontière algérienne, il faut se rendre au consulat de Rabat ou de Casablanca, soit une nuit en train dans chaque sens, faire une file décourageante puis attendre que la décision suive son chemin entre le Maroc et la Belgique. Résultat : quand le visa arrive (et souvent ce qui arrive, c’est un refus non motivé), l’enfant est déjà né ou le mariage déjà conclu. Cette démarche est tellement épuisante et aléatoire qu’une fois le visa obtenu, on est tenté de tirer sur la corde pour en profiter au maximum.

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